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Les plantes aquatiques : gardiennes de la santé des lacs

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Par une journée chaude d’été, le bleu cristallin d’une piscine peut sembler plus attrayant pour la baignade que les mystères d’un lac. Pourtant, une myriade de créatures semble croire le contraire. La richesse du monde aquatique échappe souvent à notre regard. Cette ode à la vie est ponctuée par les clapotis discrets de l’eau, entrecoupée par le frémissement des roseaux, accompagnée par le coassement lointain des grenouilles. Au cœur de cette véritable symphonie vivante se trouvent les plantes aquatiques, berçant silencieusement leurs feuilles au gré du courant. Elles offrent un refuge essentiel, contribuant significativement à la biodiversité du milieu. La richesse de la vie qui prospère parmi ces végétaux aquatiques confère au lac une résilience exceptionnelle face aux fluctuations de température et à la présence éventuelle de contaminants.

Le rôle des plantes aquatiques

Tout comme les plantes terrestres, les plantes aquatiques sont des éléments clés de l’écosystème. Les nombreuses espèces qui y trouvent refuge contribuent à maintenir l’équilibre délicat de l’environnement. En plus d’être un habitat de choix pour la biodiversité, elles sont de grandes productrices d’oxygène.

Les plantes aquatiques filtrent l’eau simplement en absorbant les nutriments pour croitre. Ce faisant, elles préviennent la prolifération d’algues nuisibles et de cyanobactéries. La présence de ces végétaux, complètement ou partiellement submergés, contribue aussi à stabiliser les berges en ralentissant les vagues, limitant ainsi l’érosion. De cette façon, les plantes aquatiques empêchent que les sédiments ne soient emportés par le courant.[1]

Enjeux d’eutrophisation

Depuis quelques années, la croissance excessive des plantes aquatiques est devenue plus fréquente dans les plans d’eau du Québec, entrainant un déséquilibre dans l’environnement. Ce phénomène est connu sous le nom d’eutrophisation. Il résulte d’une augmentation excessive des nutriments, notamment des composés azotés et phosphorés qui proviennent des activités humaines tel l’épandage d’engrais, des déversements d’eaux usées, du ruissellement, de l’érosion des sols, etc. Cette abondance de nutriments intensifie la croissance des algues et des plantes aquatiques, ce qui mène à un débalancement de l’écosystème.

L’eutrophisation épuise les niveaux d’oxygène dissous dans l’eau et peut mener à la création de zones mortes où la vie aquatique, y compris les poissons, ne peut survivre.  Des conditions météorologiques particulières, telles que les périodes de chaleur prolongées, peuvent favoriser l’eutrophisation, mais la principale raison est l’enrichissement du bassin-versant par les activités humaines.

L’eutrophisation des plans d’eau affecte divers aspects de notre quotidien, tels que la qualité de l’air et de l’eau, la valeur des propriétés riveraines, en plus d’engendrer des coûts de traitement important si l’on souhaite utiliser le lac comme prise d’eau potable. La pratique d’activités récréatives et touristiques est aussi fortement impactée puisque la présence de plantes peut obstruer les voies navigables. [2]

Bien que la présence en grand nombre de plantes aquatiques puisse être dérangeante, il est crucial de ne pas les arracher. En effet, l’arrachage peut encourager la prolifération de certaines espèces, comme l’élodée du Canada, et ainsi aggraver le problème. Pour une navigation sécuritaire, les utilisateurs de bateau à moteur peuvent prendre l’habitude d’utiliser toujours le même chemin afin de créer un corridor de navigation et ainsi limiter l’empêtrement dans les plantes aquatiques.

Cas du Grand Marais de Saint-Gédéon 

Herbier dense d’élodée du Canada au Lac-à-la-Croix, 2023L’élodée du Canada est indigène à la région et elle est fortement rependue dans nos plans d’eau. Elle est particulièrement problématique dans le Grand Marais de Saint-Gédéon, où elle rend la navigation de plaisance difficile. Elle est si prolifique dans ce plan d’eau qu’elle recouvre presque entièrement le fond du lac et forme un herbier dense qui s’emmêle dans les moteurs des chaloupes. La prolifération de cette plante est due à des conditions de croissance favorables, comme la température élevée de l’eau en été, la faible profondeur du Grand Marais et le ruissellement agricole dans le bassin-versant de la Belle Rivière. De plus, elle a la capacité de se propager à partir de fragments. [3]

*Photo : Herbier dense d’élodée du Canada au Lac-à-la-Croix, 2023

 

Les bonnes pratiques 

Dans le but de limiter la prolifération excessive des végétaux aquatiques, la première chose à faire est de limiter les apports en nutriments (phosphore et azote).[4] Il est crucial de mettre en œuvre des pratiques agricoles durables, d’améliorer le traitement des eaux usées et d’adopter des mesures de gestion appropriées.

Pour faire partie de la solution :

  • N’utilisez pas d’engrais domestiques (compost ou chimique) pour les pelouses ou les platebandes, car le ruissellement entrainera ces engrais dans le lac ;
  • Assurez-vous de la conformité de vos installations septiques ;
  • Utilisez des produits d’entretien domestiques sans phosphates (liquide à vaisselle, détergent à lessive, etc.) ;
  • Diminuez le plus possible le ruissellement des eaux pluviales sur votre terrain via des jardins de pluies ou des étangs de rétention ;
  • Préservez une bande riveraine naturelle au moins sur les 10 premiers mètres de la rive. [5]

Chaque geste compte !

Lorsqu’on limite l’enrichissement d’un plan d’eau, on prévient la prolifération excessive de plantes aquatiques et on s’évite tous les inconvénients qui en découlent. Un lac en bonne santé est un élément essentiel de notre environnement, et ce, même si nous ne le visitons pas quotidiennement.

[1] Durand, J, -R, & Lévesque C. 1980. Flore et faune aquatiques de l’Afrique sahélo-soudanienne, Volume 1 Édition de l’office de la recherche scientifique et technique Outre-Mer collection initiation – Documentation technique n44, Paris. 392 p.

[2] HÉBERT, S. & LÉGARÉ, S. 2000. Suivi de la qualité des rivières et petits cours d’eau. Québec.  Direction du suivi de l’état de l’environnement, ministère de l’Environnement, envirodoq no ENV-2001-0141, rapport n° QE-123, 24p. 3 annexes.

[3] Rappel, 2024 [En ligne] : https://shorturl.at/efIKY

[4] MELCCFP, 2024 [En ligne] : https://www.environnement.gouv.qc.ca/eau/flrivlac/phosphore.htm

[5] Rappel, 2024 [En ligne] : https://rappel.qc.ca/fiches-informatives/eutrophisation/